La robe et la meute

Marine Le Pen a voté la loi Sapin qu’elle dénonce aujourd’hui, et elle est l’une des plus ferventes promotrices du durcissement des peines… sauf quand la justice la vise, elle.

Masavi – La robe et la meute

Marine Le Pen.
Condamnée pour avoir détourné près de quatre millions d’euros de fonds publics européens,
à travers des assistants parlementaires fictifs.
Un système organisé, structuré,
au profit du Rassemblement national.
La justice a tranché :
quatre ans de prison dont deux ferme,
cinq ans d’inéligibilité immédiate.

Elle parle de décision politique.
Mais elle oublie.

Elle oublie qu’en 2013, elle a voté la loi Sapin 2,
cette même loi anticorruption qui l’a rattrapée.
Elle oublie qu’elle défend depuis des années le durcissement des peines planchers,
qu’elle veut expulser, incarcérer, condamner plus vite,
au nom de la sécurité.
Elle oublie qu’elle a réclamé l’inéligibilité à vie
pour tout élu corrompu.

Mais quand c’est son nom sur le banc,
la loi devient ennemie.
Le juge devient bourreau.
Le tribunal devient théâtre.
Et l’extrême droite, comme un seul homme,
hurle à la dictature judiciaire.

Sur les réseaux, dans les tribunes, dans les studios,
la haine s’organise.
La présidente du tribunal, Bénédicte de Perthuis,
devient cible vivante.
Son nom, son visage, son adresse.
« Elle mérite une balle »,
« Il faut juger la juge »,
écrivent certains.
Et les élus RN en rajoutent.
« Trois mollahs du droit ont supprimé la démocratie »,
lâche l’un.
« Elles auront des comptes à rendre à l’Histoire », dit un autre.
La meute est lancée.

Mais les faits restent.
Neuf ans de procédure.
Durant laquelle Marine n’a eut de cesse d’y faire obstruction.
Deux mois d’audience.
Un jugement argumenté, public, transparent.

Et cette question, comme un clou dans le silence :
peut-on vouloir la sévérité pour les autres
et la clémence pour soi ?

Marine Le Pen, en première ligne pour faire voter
des lois plus dures,
plus automatiques,
plus impitoyables,
dénonce aujourd’hui la rigueur de la justice.
Pas pour l’adoucir,
mais pour s’en extraire.

La robe du juge tient bon.
Noire. Digne.
Insultée, menacée, mais droite.
Et derrière elle, ce qu’il reste d’État de droit.
Ce qu’il reste de République
quand l’extrême droite comme à son habitude s’agite et crit au complot de la justice et du système comme dans l’amérique de Trump, la Pologne d’Orban ou l’Italie de Salvini.

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